Minus

Une bonne fée devait se désaltérer ce jour-là dans la rivière…
“Miiiiia ! Miiiiia ! Miiiiia !”
Réveillée par des miaulements déchirants, je regarde l’heure : presque minuit ! C’est incroyable ce que ce chat minuscule peut émettre de décibels ! Il tient dans le creux de la paume ; des gens qui ont vu de la lumière l’ont apporté, ne sachant qu’en faire : ils l’ont trouvé au bord de la rivière dans laquelle il était visiblement tombé, à moins qu’on ait tenté de le noyer… Triste spectacle, ce chaton de deux ou trois semaines, trempé, terrorisé et vraisemblablement affamé !
Commencer par le sécher, lui donner à manger et le rassurer. Heureusement, nous avons du lait maternisé pour chatons. Il avale d’un trait le petit biberon qu’on lui prépare, entre deux “Miiiiia ! Miiiiia!” impérieux, puis emmailloté dans un vieux pullover, il s’endort, épuisé par toutes ces mésaventures…
Nous l’appelons Minus et il est si petit que nous nous demandons si nous parviendrons à le sauver… mais Minus s’accroche à la vie (ou peut-être est-ce la vie qui ne veut pas l’abandonner ?). Valse des biberons, toutes les six heures environ. Il est très laid, le poil rare, le corps rachitique et la tête disproportionnée avec de gros yeux un peu exorbités ! Quelle drôle de petite créature, dénuée de ce charme habituel des chatons !
Deux semaines plus tard, on nous amène une chatte allaitante avec ses deux chatons (des malheureux dont le maître a dû partir en maison de retraire) : Minus va en profiter, en accaparant de temps à autre une tétine, à l’insu de la minette qui le rejette. C’est bien, il grandit, grossit un peu et retrouve un pelage “écaille de tortue” qu’on n’avait pas pu reconnaître jusque là. Ses “Miiiiia ! Miiiiia !” sont moins désespérés et il commence à jouer avec les autres chatons, plus robustes que lui, bien que plus jeunes.
Un petit séjour chez ma grande sœur pour l’habituer à “naviguer” dans une maison sans redouter les monstres bruyants (téléphone, sonnette d’entrée et autre aspirateur…) et c’est la rencontre avec sa future maîtresse.
Une amie lui a confié la garde du chaton qu’elle vient d’adopter pour le week end. Minus, qui est devenue une très jolie petite chatte, apprécie ce compagnon de jeu, plus grand qu’elle mais qui sait se montrer délicat dans leurs folles gambades et empoignades… Il aurait été dommage de séparer ces deux-là !

Voilà comment un affreux petit Minus s’est métamorphosé en une superbe Charbone qui coule à présent des jours heureux dans une jolie maison (loin des voitures) entourée de l’affection de sa gentille maîtresse et de son grand frère chat.

Une bonne fée devait se désaltérer ce jour-là dans la rivière…

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